dimanche 12 septembre 2010

Fragments de pensée déglinguée

C'est ennuyant, parfois, cette certitude d'être née trop tard. Mauvaise décennie. Mauvaise génération. Mauvais siècle, même. Caractère vieillot et robes noires de trentenaire classique. Audrey Hepburn et Coco Chanel atterries en 2010 et s'éplorant des ravages modernes.

Je ne me sens pas à ma place dans un vingt-et-unième siècle ringard, atrocement technologique. Ces classes de jeunes qui ne se parlent plus, qui s'envoient des SMS pour dire qu'ils s'emmerdent dans leur cours de littérature. Ces pseudo-chicanes sur BlackBerry Messenger. Bip Bip Bip pour dire Tu m'énerves. On se connaît plus sur Facebook que dans la vie. On étale qui nous sommes sur Internet, et on se dit à peine bonjour si on se croise dans la rue.

J'aime m'imaginer être née 30 ans, 100 ans plus tôt. Inventer la vie que j'aurais, les détails insignifiants qui m'auraient excédée, les hommes qui m'auraient séduites et les femmes que j'aurais admirées. Les livres que j'aurais lus et la musique que j'aurais aimée.

Et je suis certaine que ça n'aurait pas tellement changé.

Parfois, je rencontre des gens et sais pertinemment qu'ils seraient mes amis si nous étions de la même génération, et non de simples connaissances polies, professionnelles, dialogiques.

Que les discussions littéraires pourraient se poursuivre en un "café existentialiste" comme les hipsters dont Cath me dit prendre part pour ce qui est de ma mentalité.

Parce que je ne porte pas de grosses lunettes. J'ai des verres de contact dont la force n'est plus la bonne, et qui me pousse à m'asseoir près du tableau pour y lire ce que mes profs écrivent.

Avantageux en Formation à la vie culturelle, par contre !

Les gens ont généralement une idée trop restreinte de l'amitié, de l'amour ; alors ils blâment ces liens vains et qui m'importent le plus sur la mauvaise relation, la mauvaise opinion que j'ai de mes parents.

C'est facile : c'est parce que tu n'as pas une bonne relation avec ta mère. Freud disait du bon, mais on en a tiré beaucoup de n'importe quoi.

 Je travaille trop, et je n'aime plus vraiment mon emploi. J'y fais mes travaux à moitié et tronque mon sommeil, ma vie sociale. Et je m'aperçois qu'il devient de plus en plus difficile de gérer nos amis quand on en expansionne le nombre avec les années qui passent.

Alors je vais devoir mieux classifier mes catégories amicales : les vrais, les amis qui le méritent, les amis d'école.

Question de mieux planifier mon horaire de "cafés existentialistes" !

Je médite sur l'apprivoisement du renard dans Le Petit Prince, parce que je découvre que les gens ne sont pas tous comme moi, que certaines personnes ne se donnent pas spontanément et qu'il faut instaurer un climat de confiance pour recevoir quelques bribes de leur affection, de leur estime, de leurs confessions. Et je suis patiente depuis deux ans, et je vois que cette patience d'ange commence à porter fruit.

"Merci d'être passée me voir !", répété et ironique - car je sais que c'est toujours moi qui propose, qui ose, qui revient à la charge en me pointant, un bon matin à chaque deux ou trois semaines, dans ce petit espace perclus qui sent bon l'encens et le parfum raffiné.

Et je pense que je suis de mieux en mieux capable de gérer ma vie, mes émotions, et que la confiance en moi, si longuement piétinée dans un coin poussiéreux de mon être, se remet tranquillement de ses blessures.

Et, pour une fois, ce n'est pas à cause de l'anastomose de deux regards contents de pouvoir se contempler à nouveau dans un local perdu d'un Casault moisi.

Mais, peut-être, de la maturité longtemps attendue et enfin trouvée !

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