dimanche 12 septembre 2010

Tentative d'écriture automatique

Inspiré de Paul-Marie Lapointe.

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Je voudrais que nous mourions comme le jour, mais nous sommes des fragments d'embryons éternels. Stériles immortels dans un formol turquoise de ciel cassé. Embryons desséchés comme ceux de Satie, sourires de piano noir et blanc, las de trop se figer de trop s'éparpiller.

Je voudrais que nous mourions comme le jour et le vert déclinant de tes murs déglingués. Croquis d'enfants et cris apprivoisés dans l'écho de mon sommeil fuyant. Insomnie attente flegme désir. Nous sommes à peine des ombres terriennes et j'esquisse la conquête de la chair, la reddition de l'éphémère. Nous sommes un souffle hésitant de nuées lactescentes. Un rire guillotiné par la fenêtre d'où s'est enfui un rai blafard, fugitif comme les oiseaux blancs du mariage et de la chasteté. Le divan où je me perds, fleurs abstraites de grimoires craquelés, odeur de vieux piano moisi et d'écume de mûres sauvages.

Je voudrais que nous mourions comme le jour, et les pêches trop mûres qui se désagrègent contre ma langue rêche. Langue qui se sèvre, qui craque, langue asséchée vidée de son sens. Langues muselées, fusionnées. Langues rapidement souillées contre les mots d'apparat, les soliloques guindés d'ombre bleue. Et la bouche rouge d'être trop grugée, molle de trop s'éclipser.

Je voudrais que nous mourions comme le jour, parce que le soleil est noir et moi aussi. Je suis le noir diaphane qui se résorbe aux couleurs et aux forêts. Quartz rose baroque, indécence estivale de décembre. Chopin chimique sur mon giron, corpuscules de sourires sur mon crayon ma nuque. Je construis des idées avec du papier, des cailloux, des rubans de rivières roses et froides comme les joues pâles de cette mère d'occasion, celle que je rencontre la nuit et à qui je parle d'écriture, de littérature lis-tes-ratures.

Je voudrais que nous mourions comme le jour, et j'ai les os qui craquent, le corps disloqué le cou brisé. Les cheveux épars de larmes et de chair. Sang brut sur mes mains bleues, sang noirci du péché des fées et des larmes taries pour un regard musical perclus sous terre. Sommes-nous morts, mon amour, car je sais qu'on nous a enterrés vivants, cellule friable et immuable qui sème le désordre. Ta présence dans la terre sans bruit dans l'humus sacré des océans d'acier dans les bas-fonds spectraux des arias de Bach.

Mais toujours, j'aimerais que nous mourions comme le jour.

1 commentaire:

Mr point a dit…

bravo très joli texte, merci.