vendredi 26 mars 2010

Au XIXe siècle, la fiction est porteuse de vérité. Je pense qu'aujourd'hui aussi...

Je devrais aller me coucher. Je viens de rentrer chez moi (il est passé 2 hrs de la nuit) et j'ai un examen à 8 hrs 30. Mais c'est quand je dois le moins blogger que les idées me viennent en tête. Fichue inspiration !

La vie en société impose des rôles. Implicitement, on en endosse un, on se créé un personnage en grossissant certains de nos traits ; on ne ment pas, on ne se cache pas, on s'exagère, on se caricature pour que les gens puissent nous reconnaître, nous « connaître », nous trouver amusants et nous considérer. En ce sens, nous appartenons à un groupe, et notre amour-propre, dixit ce cher Rousseau, s'en trouve flattée. Nous nous enorgueillissons, nous nous pensons une meilleure personne, notre confiance en nous grimpe et nos amis continuent de nous aimer. Alors on continue, on pousse ce rôle, on l'endosse comme une seconde peau et il devient naturel pour nous.

Nous avons l'impression d'être nous-mêmes puisque, en gros, nous le sommes. Nous ne portons pas de masque, nous ne feignons aucun trait qui ne nous est propre ; on grossit les nôtres, on les exagère, les pousse presque, parfois, à l'extrême, au ridicule. Mais nous nous sentons aimés et heureux, acceptés par cette collectivité qui nous inspire, qui nous attire, qui nous semble la meilleure.

Mon rôle n'a pour ainsi dire pas changé depuis le Cégep. Je suis la romantique, l'aristocrate un peu snob qui porte du noir et qui écoute du Classique, et qui finit toujours par « tomber amoureuse » de ses profs (et « amoureuse » prend ici diverses significations. Je pense.) La isabelle du Cégep, c'était ça, et au fond, je l'aimais bien, même si je savais pertinemment que je n'étais pas QUE ça. Et je m'aperçois que je traîne cette isabelle romantico-aristo-déiste avec moi à l'université, comme si cette isabelle que j'ai élaborée en 2 ans était tissée à même la trame de mon caractère. Cette liberté de renouvellement de soi dont me parlait Y. ne tient même plus ; c'est comme si je n'avais plus le choix, je m'imposais inconsciemment ces caractéristiques et je les gravais dans l'imaginaire et les attentes de mes nouveaux amis littéraires.

Peut-être parce que, ayant déjà constaté que cette moi accrochait les gens et les faisait rire, je n'ose pas m'aventurer à explorer différents traits « publiques » de moi de peur de ne pas avoir d'amis. Je ne sais trop.

On croit avoir un contrôle sur soi, sur le personnage que nous offrons au regard avide et critique du groupe, mais l'on s'aperçoit qu'il devient parfois impossible de s'en dissocier. La fiction devient réalité. Nous devenons fiction.

Est-ce que les acteurs, après avoir travaillé, médité et incarné un rôle pendant X mois, peuvent s'en départir comme d'un ordinateur qui ne fonctionne plus, d'un pantalon fade devenu trop petit ? Est-ce qu'ils deviennent tellement leur personnage que ce dernier les influence dans leurs choix quotidiens, sur leurs goûts, sur leur comportement ? Est-ce pour cela qu'il y a tant de couples qui se forment sur les planches d'un théâtre : comment peut-on rendre un amour crédible aux yeux d'un public sévère si nous n'éprouvons rien pour la personne de qui nous sommes censés être amoureux ? Y a-t-il des dépressions, des désillusions, des crises quelconques lorsqu'un acteur délaisse un rôle qui lui seyait particulièrement bien ?

Je pense que je devrais m'arrêter un peu. Peut-être cesser toutes ces réflexions vaines ou, du moins, me distancier de ces pensées un peu trop abstraites en cette nuit où je devrais aller dormir, car j'ai un examen dans moins de 6 hrs.

Je ne me relis pas, j'hésite à poster ce billet, mais tant qu'à l'avoir écrit... Un jour, je regretterai peut-être ce que je dis là, tout ce qu'implique cette philosophie de la création de soi crachée et vomie par un cerveau trop fatigué pour fonctionner correctement.

Mais je fais comme je peux, être de papier que je suis dans la fiction que je m'impose. Et c'est ici que la vulgaire poupée de fiction (moi, en l'occurrence) réalise que ce que je dis devient presque nietzschéen.

Suffit.

Allez hop ! je me couche !

J'ai hâte à mardi ; je vais voir Y. ! Yé, un peu de lumière dans ce gouffre existentialiste et presque plus romantique.

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