mardi 2 mars 2010

t'EUF t'EUF, speak white por favor.

Je viens d'aller perdre une belle heure ensoleillée à lire des articles sur le site du Devoir, à défaut d'être moi-même abonnée (j'y songe sérieusement, mais je ne lis pas vraiment le journal en temps normal...) ; je suis ainsi tombée sur la critique d'un journaliste sur un projet qu'un professeur au collégial a lancé à des écrivains québécois, soit de réussir l'Épreuve uniforme de français (je vous renvoie au texte original : Essais québécois) Bon, je vous épargne un peu les conditions, mais celles des écrivains étaient bien meilleures que celles que nous avons à subir au sortir de notre cours de français III : alors que nous avons 4 h 30 pour prendre conscience des 3 sujets possibles, lire les textes, réfléchir sur un sujet et puis rédiger la dissertation critique, les écrivains ont eu plusieurs semaines pour le faire, ont pu choisir parmi tous les sujets proposés depuis l'instauration de l'EUF et ont eu la chance de ne pas être évalués pour la qualité de la syntaxe et de la grammaire. Enfin, c'est plutôt horrible comme concept, ça ne sert strictement à rien ; il aurait été bien plus intéressant de voir le résultat des écrivains sous les conditions réelles de l'EUF ! Mais bon. Je ne m'étendrai pas là-dessus. 

Je profite donc de ma pause de lecture qui s'éternise (nooon, je ne veux pas commencer Maupassant, je n'aime pas Maupassant, même Yolaine ne m'a pas fait aimer Maupassant !) pour réfléchir un peu sur la pertinence de l'EUF ou, plutôt, sa nécessité. 

Honnêtement, je trouve ça un peu triste que l'on en soit arrivés là, à cette épreuve qui est, somme toute, assez facile si l'on connait bien la structure dissertative que l'on se tue à nous apprendre lors de nos 3 cours de français. Je ne suis pas une brute des plans argumentatifs ; mes plans sont à l'image de mon intelligence, un peu boiteux et incohérents ; mes idées sont prouvées par des exemples et des citations qui sont souvent tirées par les cheveux, et j'ai quand même réussi à avoir B ! (il faut C pour passer) Je pense que la plupart des gens ont ce B un peu moyen pour la démarche analytique / argumentative. 

Le côté triste dans tout ça est que 90% des gens qui échouent l'EUF le font à cause d'un manque de maîtrise de la langue. Les fautes de français. Killer. 

Et je ne comprends pas ! Il y a de cela quelques décennies, paraît-il, les étudiants avaient beaucoup plus de facilité en français. Quand j'étais en secondaire 5, notre professeur de français nous avait fait faire une petite dictée : la moyenne de fautes dans ma classe - la classe dite « forte » - était d'environ 8 alors que celle de 1950 était de 2 ! 

Je me suis souvent posée sur la question : qu'est-ce qui fait qu'on est aussi nuls en français, nous, la génération des perdus, la génération sur la lisière de la télévision et d'Internet ? Est-ce, justement, à cause de cette proximité de la technologie qui nous pousse à mal écrire et à ne plus lire, que nous sommes rendus des déchets de la langue française ? Est-ce parce que nous ne lisons plus, occupés comme nous sommes à écouter des insignifiances télévisuelles et à aller raconter notre vie a-grammaticale sur Facebook ? 

Ou, justement, est-ce cet encouragement à aller nous bourrer la tête de multiples autres langues avant de maîtriser tout à fait la notre qui nous fait trébucher ? Les jeunes, à peine comprennent-ils la structure de base d'une phrase, sont encouragés à aller apprendre celles de l'anglais et de l'espagnol, mélangeant ainsi les bases pour donner une langue maternelle atrophiée et meurtrière à leurs années de cégep. 

Je ne suis pas contre le polylinguisme ; je trouve qu'il est utile de parler une deuxième et une troisième langue, mais à quel prix ? Ce qui me semble arriver aujourd'hui, c'est qu'on banalise l'importance de bien parler français, qu'on relaie au statut de simple moyen de se faire comprendre. Bon, peut-être est-ce la base, se faire comprendre ; mais pourquoi l'atrophier ainsi, notre si belle langue française alors qu'elle est déjà si menacée par la mer anglaise qui n'attend qu'un petit coup de vent pour l'engloutir ? Pourquoi tout sacrifier des beautés poétiques du français sous prétexte que l'anglais est la langue internationale, celle que l'on parle de plus en plus à Montréal de toute façon ? Tant qu'à faire, à quoi sert l'entretien et l'élévation d'une culture si elle passe toujours en deuxième après l'American one ? 

J'ai déjà été américanophile, et je le regrette aujourd'hui. Je stipulais, haut et fort, et à qui voulait l'entendre, que la culture francophone, et québécoise surtout, ne valait rien à côté de celle de « l'Aigle trop fier » ; comme j'avais tort ! 

Et malheureusement, beaucoup, sans peut-être en avoir conscience, agissent ainsi ; c'est l'américanisation du monde depuis un demi-siècle, et ça me dégoûte. 

Aujourd'hui, je suis muette sur les aléas de mon existence. M. n'est pas venu lundi, et on dirait que je m'en fiche. Je n'abandonnerai pas, mais je ne ferai plus de grands efforts non plus. Advienne que pourra, petit homme ! 

Et j'aimerais voir Yolaine aujourd'hui. 

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